[Sanglante] L'Arrestation de Magdalena

Magdalena était assise à son bureau quand elle entendit qu'on frappait à sa porte. La suite la fit sursauter. Comment ça, la milice ? Elle redressa son buste, délaissant le devoir sur lequel elle planchait. Sur son bureau traînait le journal de la veille dont un long et glauque article traitait d'une affaire de meurtre survenue en ville il y a peu. Elle cligna les yeux et se leva.

Elle ne se doutait pas de ce qu'il l'attendait. Elle avait eu connaissance du crime, en avait entendu parler de partout mais elle n'avait pas eu vent des détails de l'enquête. Aussi fut-elle à cent lieux d'imaginer que cette visite avait un quelconque rapport avec...

Elle ouvrit sa porte, baissant légèrement la tête en signe d'inquiétude :

"Oui ?" s'enquit-elle. Son regard se posa sur la femme qui dirigeait la petite troupe. Magdalena rentra un peu plus les épaules devant son air martial et sévère.

"Que se passe-t-il ?"

La milicienne ne bougea pas mais ses collègues entrèrent pour commencer à faire une fouille approfondie de la chambre. La femme sortit alors de la poche de sa veste deux papiers qu'elle montra à la jeune fille et lui tendit. Mais Magdalena ne comprendrait sans doute rien, il ne s'agissait que de jargons juridiques qui autorisait la milice à opérer une fouille des lieux et qui ordonnait son arrestation.

" Vous êtes Magdalena Dashwood ? Nous avons un mandat d'arrêt à votre encontre, ainsi qu'un mandat de perquisition pour fouiller les lieux... " expliqua t elle brièvement.

" Nous avons retrouvé quelque chose vous appartenant sur les lieux d'un crime... "

Elle sortit une pochette en plastique où était enfermé le morceau de tissu, couvert de sang.

" Vous reconnaissez ceci ? " demanda t elle.

Pendant ce temps, les miliciens fouillaient la chambre, aussi bien les affaires de Magdalena que celles de sa collocataire. Ils prenaient tout de même soin à ne rien abîmer, ils essayaient seulement de récoleter des indices et cherchaient tout objet qui aurait pu être identifié comme l'arme du crime.

A ce moment, une jeune fille blonde, Mairéad Nerden, la collocataire de Magdalena, revint de la bibliothèque, les bras chargés de livres. Elle se stoppa en arrivant près de la chambre et observa la scène avec de grands yeux à la fois vides et étonnés d'une telle invasion.

" Un problème ? " demanda t elle doucement.

Les yeux de Magdalena s'étaient arrondis sous le coup de la surprise : son ruban.... Mais que faisait-il dans cette pochette plastique, entre les mains de cet officier suspicieux ? La vue du sang lui causa une moue une dégoût. Ne sachant pas ce qu'elle devait dire, elle ouvrit la bouche en vain. Puis se ravisa, et bafouilla quelques "mais...", "heu....", "je ne comprends pas...".
Mais entre-temps, les hommes de la milicienne s'étaient engouffrés dans sa chambre pour mener leur recherche, elle les regarda d'un air indigné : elle était traitée comme une criminelle et la milice violait sans vergogne son intimité. Même si les miliciens faisaient preuve d'une habilité et d'une précaution hors-norme, cela ne changeait pas le fond de la forme : ils fourraient leur nez partout.

C'est l'intervention de Mairéad qui rendit à Magdalena le plein usage de la parole :

"Je suis suspectée dans une affaire de meurtre !" lui répondit Magdalena d'une voix étranglée.

"Ils sont en train de fouiller notre chambre...."

" Nous sommes de la milice d'Aïsthèsis... " dit la jeune femme en se tournant vers Mairéad.

" Nous avons un mandat de perquisition pour trouver tout indice qui pourrait être utile dans la résolution de cette enquête... "

Mairéad ne trouva rien d'autre à répondre que de hocher la tête. Elle patienta à l'entrée de la chambre, comme si elle faisait seulement la queue au supermarché et attendait son tour à la caisse. Elle frola à peine Magdalena du regard, comme si le fait qu'elle soit suspectée de meurtre importait peu. D'un côté, cela avait quelque chose de rassurant, elle ne semblait pas la tenir pour coupable. Mais son indifférence habituel pouvait paraître pour du mépris total à l'égard du sort de sa collocataire.

" Je pourrai revenir dans ma chambre rapidement ? " demanda alors Mairéad, comme si Magdalena était totalement transparente.

" Une fois que mes hommes auront fini de fouiller... ce qui ne devrait plus être long... " répondit la femme.

" Quant à vous, Mademoiselle Dashwood, je dois vous emmener au poste de surveillance... " ajouta t elle pour Magdalena, en sortant une paire de menottes taillées dans une sorte de cristal. Une matière qui annihilait toute magie et empêchait les criminels d'en user pour s'échapper.

C'est avec le regard écarquillé et inquiet que Magdalena vit ces menottes se refermer sur ses poignées. Elle cligna de ses longs cils noirs et releva une figure désabusée.
D'abord une phrase, une seule, à l'égard de sa collocataire :

"Merci pour ton soutien...."

Puis un monologue quelque peu larmoyant à l'égard de ses futurs geoliers :

"Vous devez, vous devez... Dur travail que le vôtre ! Vous débarquez, vous fouillez ma chambre comme si j'étais déjà coupable, et me privez de toute liberté tandis que vous prétendez ne vouloir que m'interroger... Je me sens vraiment lésée sur mes droits, monsieur ! Heu madame ! Mais allez-y, je vous en prie, emfermez-moi comme on enferme un oiseau ! "

Et elle baissa la tête tel le condamné à mort qui accepte son sort.

" Désolée, Mademoiselle, ce sont les ordres... " s'excusa la milicienne.

Cependant, son ton n'était pas vraiment compatissant. Elle fit donc signe à la jeune fille de la suivre. Pendant ce temps, Mairéad s'était adossée au mur pour attendre que les locaux soient libérés. Elle les regarda s'éloigner avec son habituel air placide et déconnecté.

" Le meurtre a été d'une extrême violence et vous êtes la première sur la liste des suspects pour l'instant. Nous devons prendre quelques précautions au cas où... "

Elle prit Magdalena par le bras, mais sans violence, pour la faire sortir de l'internat. Par chance pour la jeune fille, il y avait peu de monde dans l'internat à cette heure et personne, hormi sa collocataire, ne pourrait assister à sa disgrace. Bientôt, elles sortirent à l'air libre et la milicienne fit monter la jeune fille dans un véhicule tiré par de robustes cheveux pour l'emmener au poste de surveillance.