Etats d'âme... et état de choc.

[ La Forge d'Uru]


Gwenliann était toujours inconsciente lorsque Gareth l'amena à la maison de guérison. Elle venait de faire une sacrée chute à cheval et sa tête en avait pris un sacré coup. Elle respirait toujours cependant. Elle avait sombré dans les affres de l'inconscience. Si son corps restait inanimé, son esprit, lui, en profitait pour se reposer.

La jeune femme n'avait cessé de mener un combat permanent entre sa raison et ses sentiments. Son esprit était torturé et elle avait pris presque avec soulagement cette tombée dans les tréfonds du néant. Avant de sombrer totalement, elle avait eu une dernière pensée. Elle avait espéré ne jamais devoir se réveiller pour faire de nouveau face à ses démons.

A présent qu'elle s'était évanouie, qui pouvait savoir où naviguaient ses pensées ? Qui pouvait savoir ce que cachait cette âme si renfermée ? Elle s'était échappée un instant du monde de la conscience... elle voulait acceuillir l'oubli à bras ouvert, ne serait-ce qu'un temps.

Gareth respirait enfin. Après une longue et harassante chevauchée, ils étaient arrivés à la Maison de Guérison. Des médecins l'avaient pris en charge et avait pu panser sa plaie. A présent, la jeune femme reposait sur un lit d'hôpital dans une chambre seule. Le jeune homme ignorait le temps qu'elle resterait inconsciente, mais il se sentait coupable de cette chute. Peut-être devrait-il être à sa place sur ce lit?

Assis sur un fauteuil, il tenait de sa main gauche le lys que Gwenliann avait fait apparaître juste au moment de sombrer dans l'inconscience. Et de l'autre il tenait la main de la jeune femme. Il ne savait plus quelle heure il était, ni à quelle moment de la journée on se trouvait. Il lui restait juste cette douleur au coeur, et Gwenliann inconsciente...

*J'avoue être complètement perdu...*

"C'est bon signe..." qu'est-ce que ça peut bien vouloir dire? Gwenliann était vivante et prête à reprendre la chasse à l'homme? Gareth soupira à cette pensée, il ne savait même pas pourquoi il était encore ici. Dès qu'elle serait remise sur pied, la jeune femme accomplirait son acte jusqu'au bout. Pourtant, quelque chose le poussait à rester ici. Sa main ne pouvait lâcher la sienne, et son regard restait posé sur elle, attendant le moindre signe de vie. Il caressait son front et ses cheveux avec douceur, tel un objet précieux qu'il voulait protéger.

*Fou que je suis...*

Enfin, elle sembla remuer! Il glissa lentement ses doigts de la main de Gwenliann, de peur qu'elle prenne mal ce geste. Restant silencieux, il la regarda émerger. Il aurait voulu, à ce moment précis dire quelque chose... Mais les mots restaient noués au fond de sa gorge.

En revenant à elle, Gwenliann reçut comme une chape de plomb la douleur dans tous ses membres endoloris. Où était-elle ? Elle ouvrit doucement les yeux et ce qu'elle vit fut d'abord un plafond blanc. Il lui semblait que cette première image était comme un premier regard sur le monde. Pourtant elle n'était pas morte, ni même rescucitée. L'odeur aseptisé typique des lieux médicaux atteignit ses narines et elle eut soudain l'impression que son coeur se soulevait d'écoeurement.

Enfin, elle sentit le contact furtif des doigts de quelqu'un qui glissèrent le long de sa paume. Elle tourna alors la tête dans sa direction, prenant alors conscience qu'elle n'était pas seule.

" Toya ? "

Sa voix était éraillée, comme celle des convalescents restés inconscients pendant des mois. Aussitôt qu'elle se mit à parler, elle eut l'impression que ses propres mots résonnaient dans sa tête comme si quelqu'un avait sonné un gong à l'intérieur même de son esprit. Elle grimaça un peu. Elle se sentait étrange... une sensation qu'elle n'avait que rarement connu jusque là... Elle se sentait... faible...

" Je suis dans une maison de guérison ? Qu'est-ce que je fais là ? " demanda t elle.

Ses yeux se posèrent de nouveau sur Gareth, inquisiteurs et méfiants :

" Qu'est-ce que tu fais là ? "

Gareth soupira, elle avait l'air déjà en pleine forme et prête à l'étrangler avec sa perfusion. Il croisa les bras et l'observa avec un petit sourire, presque soulagé de la voir ainsi. Elle l'avait encore appelé Toya... comme au début lorsqu'ils étaient encore ennemies...

"Je m'appelle Gareth, déclara-t-il en gardant son petit sourire, à moins que ta chute t'es fait perdre la mémoire de mon prénom..."

Il détestait ce nom, il avait l'impression d'être encore sous le joug des Kannagi. Le jour où il avait décidé de changer de vie, de décider de ses propres actes et non d'obéir sagement, il avait changé de prénom. Le jeune homme tira sa chaise, s'approcha de Gwenliann et se pencha légèrement sur elle.

"Tu devrais me remercier de t'avoir amener ici, sinon tu serais en train d'agoniser près de la Forge d'Uru."

Gwenliann ne comprenait pas un traitre mot de ce que Gareth lui racontait. Agoniser ? Près de la Forge d'Uru ? Qu'est-ce qu'il racontait, elle n'avait jamais mis les pieds dans cette région.

Elle essaya de se redresser dans son lit mais ses membres endoloris la rappellèrent à l'ordre. Avec une grimace de douleur, elle se contenta alors de se caler dans son oreiller. Puis elle posa de nouveau les yeux sur le jeune homme.

" Qu'est-ce que tu racontes ? Je n'ai jamais été aux alentours de la Forge. La dernière chose dont je me souvienne c'est... la fois où on s'est battus dans le parc et que tu m'as transformée en poule... "

Sa voix était revencharde, ce souvenir était le dernier qui soit vif à son esprit. Le reste était un trou noir : leur nuit passionnée, les mots blessants de Gareth à son encontre, le contrat du clan Kannagi... Tout cela avait disparu dans le désert du néant. Elle ne se rappellait plus de rien.

Son visage se fit dur et son regard acéré. Est-ce que le jeune homme essayait de se jouer d'elle ? Pourquoi était-il ici alors qu'ils étaient loin d'avoir une entente cordiale ? Elle ne comprenait pas. Quelque chose lui échappait mais elle n'arrivait pas à trouver quoi. Pour la simple et bonne raison que ce "quoi" était enfoui dans les limbes de l'oubli de son esprit brusqué par la chute.

[Naaan, tu l'as fait exprèèèèès!!! XD]

Gareth haussa un sourcil. Il n'avait pas tout saisi.

"Comment ça? Mais cet évènement dont tu parles a eu lieu il y a plusieurs semaines..."

Que se passait-il? Le faisait-elle exprès? Cela ressemblerait fort une fourberie de plus pour l'attaquer par surprise. Cependant Gwenliann semblait réellement déconcertée. Il recula et se rassit au fond de son siège.

"Est-ce que tu es en train de me dire que tu ne te rappelles pas de tes dernières semaines?"

Une amnésie? Probablement à cause de la chute... Le jeune homme hésitait sur la conduite à adopter. Etait-ce un mensonge? Etait-ce la vérité?

[Ouiiiiiiiii ! XD]


Gwenliann eut un air désabusé. Elle avait si souvent menti et été rude avec le jeune homme qu'il ne le croyait pas. Elle eut un soupir ennuyé.

" Est-ce que j'ai l'air de jouer la comédie ? Je ne trouve pas ça drôle du tout... " répliqua t elle, amère.

Elle sentit comme une vague de panique l'envahir. Avait-elle perdu la mémoire ? Combien de temps avait été effacé de son esprit ? Elle se sentait de plus en plus déboussolée et la présence de Gareth n'arrangeait rien aux choses. Si c'était lui qui l'avait amené ici, pour quelle raison ? Ils étaient sensés se détester. Pourquoi aurait-il fait ça ?

" Je ne me souviens d'absolument rien... " avoua t elle.

Sa voix était faible, elle n'arrivait pas à endiguer cette peur qui l'étraignait. Elle avait l'impression de perdre une partie de soi-même.

Tout, elle avait tout oublié? Tout depuis ce combat de magie? Gareth crut que le ciel lui tombait sur la tête. Posant sa main sur son front comme s'il venait de lui prendre une grosse migraine, il resta un moment silencieux. Certes elle avait oublié son contrat d'assassinat, et c'était plutôt une bonne nouvelle... mais...

"Est-ce que tu veux dire que tu as même oublié cette nuit-là?"

Stop! Stop! Il ne devait pas en dire plus! C'était totalement inutile... Il se frotta un peu plus le front, lâchant un soupir. Tout allait de travers depuis le moment où il l'avait rencontré. Peut-être que s'il ne s'était pas revu, il aurait pu mener une vie tranquille de professeur avec une jolie femme à ses côtés. Hélas, Gwenliann était bien présente dans son coeur et ses pensées, il ne pouvait plus reculer.

Gwenliann fronça les sourcils et l'observa comme s'il était devenu fou. Elle ne comprenait pas et se sentait perdue. Et cela avait le don de la mettre en colère. Elle se sentait frustrée, elle avait la sensation qu'on lui interdisait l'accès à une porte qui ouvrait sur la foule de souvenirs qu'elle avait perdu. Elle en aurait pleuré de rage et de dépit.

" Quel est le mot que tu ne comprends pas dans "absolument rien" ? " répliqua t elle, cinglante.

Mais elle baissa les yeux l'instant d'après. Elle voyait bien que Gareth semblait bouleversé lui aussi. Elle ne comprenait pas pourquoi mais les faits étaient là... Qu'avait-il bien pu se passer pour qu'il soit là, à ses côtés, et qu'il prenne aussi mal son amnésie ? Elle était partagée entre curiosité et frustration.

" Je suis désolée mais... non, je ne me souviens de rien... qui nous concerne... "

Elle commençait à se poser des questions. Que voulait-il dire par "cette nuit-là" ? Elle avait beau se creuser la tête, rien n'y faisait. Elle se confrontait à un mur. Elle se mordit la lèvre pour ne pas hurler de rage...

Gareth se retint de jeter contre le mur la chaise sur laquelle il était assis. Comment, comment en était-il arriver là? Il ne comprenait pas. Il s'était lui-même jeter dans la gueule du loup, enfin dans les bras de Gwenliann. Mais le loup s'en allait à présent... Et lui il se retrouvait comme un parfait idiot. Il respira lentement pour se donner le temps de réfléchir. Que devait-il faire? Lui avouer la vérité, au risque de l'embrouiller encore plus?

"Non... En fait... Il ne s'est rien passé, dit-il en baissant les yeux. Je t'ai juste trouvé près de la forge d'Uru inconsciente..."

Bien que cela lui en coûtait, il pensait avoir dit les mots justes. Si sa mémoire revenait, elle s'en souviendrait toute seule...

"Maintenant que tu es réveillée, je suis soulagé, poursuivit-il les yeux toujours rivés au sol. Je repasserai plus tard..."

Il se leva brusquement de sa chaise, et le lys qu'il tenait à la main tomba sur le sol.

"A plus tard..."

Gwenliann sentit soudain une vague de panique qui terrassa ses autres sentiments, en particulier son aversion pour Gareth. Son regard vit le lys qui tombait au sol et sans savoir pourquoi, elle fut désolée de cette vision. Elle avait l'impression que quelchose venait de se briser dans l'air mais sans savoir pourquoi.

" Attends ! Je... Ne me laisse pas seule... " s'exclama t elle.

Sa voix trahissait le doute qui l'envahissait. Gareth semblait au courant de choses dont elle ne se souvenait pas et cette perspective l'effrayait. Avait-elle vraiment perdu la mémoire ? Et si oui, quelle était la masse d'informations que son esprit avait oublié ? C'était comme plonger dans un monde inconnu, elle sentait que malgré le ressentiment qu'elle avait pour Gareth, il était encore le seul qui semblait savoir des choses qu'elle ignorait.

" S'il te plaît... "

Elle s'en voulut de paraître aussi faible et aussi appeuré. Mais elle redoutait encore plus de se retrouver seule, face à ce vide qui s'était emparé de son esprit.

" Je suppose... que je te dois des remerciements... pour m'avoir amenée ici... " souffla t elle d'une petite voix.

Gareth avait déjà commencé à marcher vers la porte quand la voix de Gwenliann l'exhorta à rester ici. Il hésitait à revenir vers elle, il songea que ce serait deux fois plus douloureux. C'était une jeune femme perdue qui s'adressait à lui, la peur de l'ignorance devait l'envahir. Oh non... son coeur de chevalier servant prenait encore le pas sur sa tête.
Il marcha d'un pas lent vers elle et se rassit sur la chaise.

"Bien, je reste si c'est ce que tu souhaites... dit-il avec un petit sourire."

Pourtant, il évitait son regard, parcourant des yeux la pièce, s'attardant à la fenêtre. Que pouvait-il dire de plus? Si l'amnésie de Gwenliann était éternelle, ce serait peut-être plus bénéfique pour tous les deux, car ils avaient autant souffert l'un que l'autre. Mais si elle se souvenait, elle lui en voudrait de n'avoir rien dit. Dans les deux cas, Gwen s'éloignerait de lui...

Au final... c'était peut-être le mieux...

"Tu n'as pas à me remercier, j'ai fait ce que n'importe qui aurait fait en voyant un blessé."

Gwenliann fut légèrement soulagée de ne pas se retrouver seule. Quand bien même il s'agissait de Gareth avec qui elle avait eu tant de disputes et de mots cruels. Néanmoins, elle força un léger sourire qui s'effaça très vite.

" Tu aurais pu me laisser à l'agonie... Je n'ai pas toujours été tendre avec toi... " répondit elle.

Elle ne se doutait pas de l'ironie de ses paroles, compte tenu de la nuit passionnée qu'ils avaient passé ensemble quelques temps plus tôt. Même si elle ne s'en souvenait plus, elle s'était montrée plus tendre et douce qu'avec quiconque auparavant.

" Je crois que c'est ce que j'aurai fait moi... Alors merci... de ne pas m'avoir laissée mourir en plein milieu des plaines arides... "

Elle ne pouvait s'empêcher de se montrer légèrement cruelle de nouveau. Ce n'était pas volontaire, à vrai dire. Mais c'était devenu une seconde nature, elle ne pouvait pas empêcher sa langue de devenir fourchue lorsqu'elle était en sa présence. Elle s'en rendit soudain compte mais pour éviter d'avoir à s'excuser, elle grimaça sous les élancements de son crâne. Elle porta une main à sa tempe, ce qui lui donna l'opportunité de ne pas avoir à croiser son regard.

Pas toujours été tendre? Gareth resta dubitatif sur le moment. Se remémorant cette soirée, il garda son sourire au fond de son coeur. Désormais, il devait oublier tout ça... Mais sa dernière phrase l'énerva au plus haut point. Pourquoi, pourquoi était-elle toujours comme ça? Pourquoi devait-il envoyer des mots blessants?

"Gwen, si c'est pour continuer de me blesser, c'était inutile de me demander de rester. Trouve-toi un autre pigeon..."

Le ton de sa voix était dure. Mais il refusait d'être le jouet de cette femme. Il s'était déjà bien fourvoyé avec elle. C'était plus fort que lui... Il ne pouvait pas s'en empêcher....

Gwenliann prit une mine surprise et offensée :

" Quoi ? C'était un compliment ! Tu dois bien te douter que te remercier est une chose rare chez moi.... " répliqua t elle d'un ton acide.

" Je suis désolée, si ça te coûte de rester ici alors va t'en... "

Sa voix se brisait peu à peu mais elle refusait de se montrer faible et appeurée. Elle se trouvait déjà dans un lit d'hôpital et devait la vie à un homme qu'elle ne portait pas dans son coeur. C'était bien assez pour sa fierté mise à mal.

" Pardon de me montrer aussi rude, mais essaye de comprendre que je suis perdue. Toute une partie de ma vie vient de m'être enlevée. J'ai l'impression d'avoir perdu des choses extrêmement importantes et c'est frustrant de ne pas m'en souvenir... "

Elle essayait de paraître le plus assuré possible mais sa voix avait tout de la convalescente faiblarde. Elle se tut, énervée par le son de sa propre voix qui la renvoyait à son impuissance. Elle croisa les bras et soupira d'agacement.

Gareth soupira. Il était inutile de discuter avec cette femme têtue. Il se mura dans un silence, préférant se taire plutôt que de dire des bêtises. Gwen se tut également. Ce petit air agacé lui allait si bien... Le professeur se donna une gifle mentale. Ce n'était pas le moment de penser à ça!
Ils restèrent tous les deux silencieux quelques minutes. Il ne savait pas quoi dire en fait. Il avait peur d'évoquer un souvenir des dernières semaines sans le vouloir.
Bon, ils n'allaient pas rester ainsi jusqu'à la fin des visites tout de même...

"Quel est le dernier évènement dont tu te souviens? demanda-t-il pour tenter de lui redonner ses marques. Ton dernier cours à la fac?"

Bien que cela la frustre parce qu'elle avait l'impression de se cogner à un mur, Gwenliann réfléchit quelques instants pour essayer de s'éclaircir les idées et faire du tri dans ses souvenirs. Elle resta silencieuse plusieurs minutes, et un tic fit son apparition à mesure qu'elle essayait de se rappeller ; elle mordait ses lèvres avec de plus en plus de colère.

" Je me rappelle avoir fait un cours de remise à niveau avec mes élèves mais je crois que c'est tout. Le seul souvenir distinct que j'ai c'est... la fois où nous nous sommes chamaillés dans le parc de l'université et que Dragomir nous a passés un savon... "

Son visage s'assombrit, elle fronça les sourcils tout en fixant le bout de son lit sans pour autant le voir. Elle était concentrée sur ses souvenirs.

" Je crois que j'ai rendu visite à ma famille il n'y a pas longtemps... Mais je n'en suis même pas sûre. Ca aurait pu être un rêve ou un souvenir plus ancien... "

Elle frotta un peu sa tempe douloureuse. Puis elle riva son regard à celui de Gareth. Elle avait un petit air désespéré et las.

" Ca ne m'avance pas à grand chose... "

Gareth soupira. Effectivement, ses derniers souvenirs remontaient à loin. La dispute dans le parc remontait à peut-être un mois. Il s'était passé beaucoup plus de choses depuis cet évènement. Le jeune homme se sentit rougir à un souvenir particulier. Une certaine nuit... Cela traversa sa mémoire comme une caresse bienfaisante. S'il pouvait, il l'aurait pris dans ses bras avec tendresse pour la rassurer. Il avait cette envie furieuse de lui raconter tout ce qu'il s'était passé entre eux deux. Mais il savait que tout cela l'avait fait bien plus souffrir qu'autre chose.

"Je crains de ne pas t'être plus utile, avoua-t-il en se mordant la lèvre. Lorsque tu sortiras, tu devrais te promener en ville. Certains lieux te rappelleront sans doute des souvenirs."

Tant qu'elle ne se promenait pas dans son appartement...

" Peut-être, oui... " répondit elle sans grande conviction.

Elle lui jeta un regard en coin, comme en proie au doute. L'espace d'un instant, elle eut la sensation qu'il était vraiment embarassée de sa situation et de ne pas pouvoir l'aider plus que ça. Mais presque aussitôt, la pensée qu'ils se détestaient cordialement dissipa ses suspicions. C'était absurde...

" Merci quand même... " ajouta t elle en tournant les yeux vers la fenêtre de sa chambre, comme si elle pouvait y trouver une réponse.

Son regard exprimait un grand vide intérieur mais elle ne voulait pas qu'on le remarque. Ses lèvres s'étaient muées en une moue amère. Elle ressentait la disparition de ses souvenirs comme la disparition d'une partie d'elle-même. Elle avait l'impression tenace d'avoir oublié quelque chose d'important, mais quoi ?

" Tu ne sais pas qui d'autre pourrait m'aider ? Quelqu'un de l'université ou une connaissance que tu aurais croisé en ma compagnie ? "