insolente prière

Vêtu de son éternelle redingote immaculée - mais parfaitement propre - et avec ses trois lames engainées au dos, Jean Du Rouvre se rendit à ce fameux temple de l'Illumination. Il trouvait le nom un peu pompeux, pour tout dire. L'illumination... Autant s'acheter une lanterne.
Ou une bonne bouteille de vin, cela pouvait aider à éclairer l'esprit, aussi.
Admirant les multiples sculptures qui ornaient l'endroit, il se plaça finalement face à un autel. Debout. Fier. Empli de morgue.
Ce qu'il y avait de bien, avec les Dieux, c'est qu'on pouvait leur dire ce qu'on voulait, jamais ils ne se vexaient ni ne vous forçaient à faire couler le sang.

"Istya", commença t-il avec suffisance en jetant un oeil moqueur à une statue de la déesse. "Je ne viens point quémander tes faveurs comme tous ces agneaux. "

Il fit un large geste du bras pour englober les quelques étudiants venus prier, et qui le regardaient maintenant avec un air médusé.

"Je ne suis point homme à mendier. Pour tout dire je ne crois guère en toi."

Il n'avait jamais en effet été particulièrement croyant. Où étaient les Dieux lorsqu'il avait été forcé de vendre le domaine familial, hein?

"Mais va! Une nouvelle vie commence pour moi. C'est peut-être le moment de réessayer de croire en ton existence. Mais pour cela, il faut que tu m'aides. Allez, illumine moi donc, puisque tel est ton pouvoir, montre moi l'avenir, montre moi toutes les grandes choses que je vais accomplir."

Il ricana, déshabillant la statue d'Istya des yeux. Il avait un air salace dans le regard:

"Tes sculpteurs t'ont joliment façonné, dis donc! J'aimerai assez que tu m'illumines aussi de ta présence charnelle, à bien y réfléchir!"

Il gloussa, puis jeta un regard féroce - mais toujours amusé - aux étudiants:

"Qu'avez vous à me toiser ainsi? Vous n'avez jamais ouï un homme prier?"

Il éclata de rire. La religion, c'était vraiment un sujet qui l'amusait... Se retournant vers l'autel, il dit:

"Allez! Illuminez moi donc, votre altesse! Montrez moi que vous n'êtes pas qu'une chimère!"

Il haussa finalement les épaules, un sourire méprisant sur les lèvres, et commença à se mettre en quête d'un augure.

Olov avait observé le manège de l'homme d'un oeil attentif et compassé.
Comme toujours, lorsqu'on ne lui parlait pas, il ne disait rien, mais l'énergumène était venu à lui. Il se borna à sortir trois fioles et les poser devant lui d'un air sérieux. Sa façon d'être, froide - Déesse, ce qu'il avait froid malgré son manteau! - froide et d'une sureté absolue, cela empêcha l'autre de parler. Il dit:

"Tu es un arpent d'Aïsthèsis. Tu peux transformer des choses... Et tu as trois choix."

Il montra une à une les trois potions:

"La modestie... La bonté... La compréhension..."

Puis plus bas, il dit, son regard scrutant le capitaine comme s'il regardait son âme:

"Aucun autre qui te mènera à la victoire."

Il y avait trois potions posées devant lui. Il attendait son choix.